Année blanche ? Il y a le feu dans la maison Culture
Posted on Tuesday 05 May 2020, 13:26 - updated on 05/05/20 - Rien ne presse - Permalink
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Année blanche ? Il y a le feu dans la Maison Culture !
Annonces du Pyromane aujourd'hui ? Et ben Non demain Damned !
dernières mises à jour de Médiapart (capture d'écran)
Merci François
Allo... les pompiers, rien ne presse tout urge !
Un film de françois Truffaut de 1966 basé sur le livre d'anticipation de Ray BradBury de 1956 .
Restez confiné(es) jusquà Nouvel Ordre !
Sortez jusquà Nouvel Ordre !
On vous tient à l'oeil jusqu'à Nouvel Ordre !
extrait article de Médiapart
La culture comme bien commun
Par Mickaël Correia
Le secteur de la culture subit de plein fouet la pandémie. Emmanuel Macron a promis de premières mesures qu’il doit annoncer mercredi 6 mai. Si les grandes plateformes numériques, sous couvert de gratuité, saisissent l’occasion, de nombreuses initiatives soutiennent l’ancrage des acteurs culturels au sein des quartiers comme des territoires ruraux.
Relocaliser pour plus de solidarité
Si les établissements culturels publics prouvent à l’aune de la pandémie que le service public peut offrir une culture émancipée des logique marchandes, ils démontrent aussi l’importance de leur mission de proximité.
Selon une enquête menée par le ministère de la culture fin mars, 68 % des bibliothèques départementales ont constaté une augmentation vertigineuse des usages de leurs ressources culturelles numériques. Les demandes en e-books, vidéos, supports de soutien scolaire ou encore d’autoformation ont doublé, voire triplé. Enfin, 43 % des bibliothèques, tout particulièrement les établissements qui desservent les territoires ruraux et les petites communes, ont observé une hausse des demandes d’inscription depuis le début du confinement.
Au regard de la pandémie, cette notion de proximité entre usagers et offre culturelle, et in fine la nécessité de relocaliser la culture, apparaît comme un point cardinal pour repenser notre modèle culturel post-coronavirus, selon Françoise Benhamou. « La crise est très profonde et en aucun cas le secteur culturel sera prioritaire. Il aura donc besoin de se réinventer et l’importance d’avoir une offre culturelle locale sera primordiale, insiste la professeure. Nous allons assister à une période de démondialisation associée à un mouvement de relocalisation : un festival ou un spectacle ne pourra plus faire appel à des artistes internationaux, il devra recruter et repenser à l’échelle locale. »
Loin des méga-festivals au lourd impact écologique produits par le géant américain Live Nation ou des plateformes streaming internationales alimentées par des data centers (centres de données) énergivores, un fleurissement de pratiques culturelles locales a vu le jour avec la pandémie. Diverses radios éphémères de proximité sont apparues, non sans rappeler l’effervescence des radios libres du début des années 1980. À Marseille, les initiateurs de Radio Finementcon tentent tous les jours sur le web et en piratant la FM de briser l’isolement de leur quartier en diffusant des informations sur le réseau d’entraide qui maille la cité phocéenne. Dans le Perche, le podcast participatif La Trogne est réalisé par des habitants du territoire qui racontent leur quotidien confiné, avant d’être diffusé sur les ondes de radios indépendantes telles que Canal B à Rennes. Radio Virus rassemble pour sa part sur internet la communauté queer autour du rap ou du punk féministes.....
et
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Loin d’être anecdotiques, ces pratiques culturelles et ces initiatives locales remettent en avant la nécessité de l’ancrage des acteurs culturels au sein des quartiers comme des territoires ruraux.
« Créer des “circuits courts” de la culture permettrait, comme en agriculture, de se passer des intermédiaires, tout en prenant en compte la diminution de l’empreinte écologique et les contraintes de distanciation sociale », reprend Laurent Jeanpierre. Et de poursuivre : « Pour imaginer un service public ou peut-être “commun” de la culture, il faut d’abord favoriser une relocalisation qui rapproche publics et créateurs, tout en développant, via le numérique, ces niches de soutenabilité ou de contre-publics plus éloignés géographiquement dont la crise actuelle montre l’importance, et enfin avec des mécanismes de redistribution, repenser une rémunération plus juste des créateurs. »
La France dénombre plus de 600 000 travailleurs de la culture sans compter les emplois induits par la sous-traitance, les services afférents à l’offre culturelle (tels que les entrepôts Amazon ou les livraisons de colis) ou encore les petites mains qui font aussi partie de cette chaîne de production, à l’instar du vigile d’une salle de concert ou de l’agent d’entretien d’un cinéma.
Le secteur culturel est depuis plus de dix ans aux avant-postes des transformations structurelles du monde du travail, telles que l’essor du travail à la maison ou du travail indépendant – en 2017, trois travailleurs de la culture sur dix étaient indépendants, contre seulement 12 % dans la population active. Dans cet univers, la précarisation accélérée, voire l’hécatombe des emplois risquent d’être gigantesques et de toucher l’ensemble des filières. « Le Covid-19 va être un cimetière professionnel pour les artistes et les travailleurs de la culture, prévient le sociologue Philippe Coulangeon. La crise agit ici comme révélateur de la matérialité qu’il y a derrière l’industrie culturelle numérique. Cette dernière se nourrit d’un grand nombre de travailleurs et de créateurs précaires. »
Face à cette catastrophe qui s’annonce, la crise sanitaire relance la bataille menée par les syndicats de producteurs et de cinéastes français pour une plus juste répartition de la valeur au sein des plateformes streaming. Contrairement aux chaînes de télévision, où il existe une évaluation du public grâce à l’audimat et des barèmes précis (en fonction de l’horaire et du jour de diffusion) pour rémunérer les auteurs, la rétribution des créateurs demeure très opaque chez Netflix. Le leader des plateformes streaming payantes n’est pas transparent sur le nombre de visionnages pour chaque vidéo proposée.
« L’accord qu’a signé il y a quelques années la SACD (Société des auteurs et compositeurs dramatiques) avec Netflix pour permettre aux auteurs de toucher un pourcentage des recettes d’exploitation de leur film ou série comporte des clauses secrètes sous prétexte de droit des affaires, s’indigne Pierre Jolivet. Nous n’avons pas accès au big data de la plateforme pour savoir comment ils rémunèrent. Pour résumé : ils font ce qu’ils veulent. Par ailleurs, toutes les chaînes de télévision publiques et Canal+ ont une obligation d’investissement dans la production cinématographique, garant de la diversité et de la spécificité du cinéma français, sauf les plateformes streaming ! »
Laurent Jeanpierre imagine pour sa part l’instauration d’un revenu minimum ou garanti pour les créateurs, mais aussi, la limitation des revenus pour les auteurs ou les interprètes les plus rémunérés. « Un vrai service public ne devrait pas seulement s’intéresser à une certaine égalisation ou sécurisation des statuts en ces temps de précarisation intense, mais aussi à une réduction drastique des écarts de revenus entre créateurs, pour une meilleure redistribution des richesses et une conception véritablement collective de la production artistique », assure le chercheur.